Depuis plusieurs semaines, on parle beaucoup d’arbitrage en Belgique. Entre des erreurs grosses comme des maisons et les tests physiques foirés de Jérôme Nzolo, il y a de la matière à se mettre sous la dent. L’arbitre de l’équipe, Julien Denoël, parle à cœur ouvert de sa passion et de la pression inhérente.
Arbitrer n’est vraiment pas facile. Alors, même s’il y a eu des décisions pour le moins surprenantes lors des dernières semaines, il faut se mettre à la place de ces hommes en noir – qui sont plutôt orange en fait. Nous, calés dans notre petit fauteuil, Jupiler à la main, on a bon. Pour une phase litigieuse, on a douze ralentis avec des zooms incroyables, des angles improbables, etc. L’arbitre, lui, il a une demi-seconde et ses deux yeux pour faire son choix. Sans parler du fait qu’en fin de match, avec la concentration permanente qu’il faut avoir, la lucidité n’est plus aussi forte.
Plutôt que de critiquer en permanence ces hommes, il faudrait en revanche les encourager et les féliciter. Parce que, pour une décision qui soulève débat, il y en a 10 qui sont parfaitement prises. Alors oui, une erreur peut arriver. Cependant, on critique énormément les arbitres pour ces décisions litigieuses et on reporte facilement les raisons d’une défaite sur eux alors qu’on ne va quasiment pas parler de l’attaquant qui rate 2-3 occasions sur un match. Un attaquant, son rôle est de marquer ou du moins d’aider à le faire. Un arbitre, lui, doit faire respecter les règles le mieux possible.
On touche alors à ce que certains voient comme un problème du foot et d’autres une force : l’interprétation. Il y a une phrase qui résume bien ça : « l’arbitre a toujours raison ». C’est plus ou moins vrai. Même pour les fautes les plus évidentes, il y a toujours cette part de choix pour l’arbitre. Petite réprimande, grosse engueulade, carton jaune ou rouge… il y a l’embarras du choix.
Une pression grandissante
On attend beaucoup plus des arbitres que par le passé, techniquement et physiquement. D’ailleurs, de nos jours, les arbitres de D1 sont des semi-pros. Ils ont un contrat avec la fédération, des entrainements toutes les semaines, etc. La pression qu’ils subissent est principalement dûe au foot-business. Comme les sommes d’argent mises en jeu sont de plus en plus importantes, on veut réduire au minimum l’interprétation des arbitres. On veut en faire des machines en quelque sorte. Dirigeants, joueurs, entraineurs, supporters, tout le monde tirent dans ce sens-là.
Pourtant il y a quand même des avancées dans les aides apportées aux arbitres. Les juges de ligne qui peuvent indiquer des fautes, des arbitres derrière les goals, la technologie sur la ligne pour les buts, … mais il y a moyen d’aller encore plus loin à mon sens avec la vidéo. Il n’y a qu’à voir le nombre de sports où elle est utilisée sans que cela ne nuise au jeu. Pourtant il y a beaucoup de gens, dont Michel Platini, qui y sont encore farouchement opposés.
« Se faire insulter en permanence »
Le national, c’est un monde à part. Au niveau provincial/amateur, oubliez tout ce que vous connaissez de l’arbitrage. En provincial, hormis la P1, vous êtes seul. Les hors-jeu, c’est vous qui devez les voir. Vos deux yeux et vos deux oreilles doivent en valoir 6. A ce niveau évidement, la pression n’est pas aussi forte. Il y a bien un petit jeu d’influence durant le match, mais ça fait partie du jeu. C’est rarement aussi virulent que ce que l’on peut voir en D1. Il arrive que certains pètent les plombs et dépassent les limites. Faut dire que sur un terrain, on n’a pas toujours à faire à des lumières.
Sur les bords de terrain, un arbitre de provincial doit se préparer à se faire insulter quasi en permanence. De l’extérieur, ça peut paraitre brutal mais quand tu es dans ton match, tu n’y fais plus du tout attention. Tu te concentres sur le jeu, les joueurs.
Le plus compliqué est de faire comprendre aux joueurs que ça peut arriver que tu te plantes parce que tu es tout seul. En provincial, les joueurs ont tendance à reporter à leur niveau ce qu’ils voient à la tv. J’en reviens à ce que je disais avec les 6 yeux et oreilles. Les joueurs attendent de toi que tu fasses le boulot de 3-4-5 arbitres, ce qui n’est tout simplement pas faisable.
Julien Denoël